En Normandie, 24 heures avec une journaliste de la presse hebdomadaire régionale

Audrey est journaliste dans un journal local d’une ville moyenne de Normandie. Dans le jargon, la jeune femme dynamique  travaille en PHR : Presse hebdomadaire régionale. Passionnée, Audrey aime se lever chaque matin pour se rendre à la rédaction, mais regrette parfois les conditions difficiles dans lesquelles elle doit exercer son métier. 24h dans la peau d’Audrey, raconteuse d’histoires pour un journal local.

9h30. C’est, en général, à cette heure-ci que la journée d’Audrey commence. Comme celles de ses collègues d’ailleurs. Trois jeunes journalistes font tourner le journal : Florian, la petite trentaine, un breton expatrié en Normandie ; Laura, 30 ans également, amatrice de bonne nourriture et sportive à ses heures perdues et Audrey, la cadette du groupe qui fait rire la galerie. Sans oublier, Isabelle, rédactrice en chef, toujours souriante et de bonne humeur.

Après avoir fait la bise à la rédaction, Audrey s’installe à son bureau. En face de celui de Laura et à côté de celui de Florian. Les journalistes travaillent dans un open-space, ils se voient et ils s’entendent. Cet espace de travail leur convient même s’ils avouent que, parfois, ils aimeraient avoir chacun leur bureau.

Après avoir balayé d’un coup de bras machinal les tas de feuilles, stylos et autres objets insignifiants, Audrey allume son ordinateur. L’outil indispensable. Une fois mis en route, le premier réflexe de la jeune journaliste : consulter sa boite mail. Des dizaines et des dizaines de mails à lire chaque matin, une grande partie allant directement à la poubelle.

« Le tri des messages électroniques, ça devient un réflexe. On sait ce qu’on doit garder et on sait ce qu’on peut jeter. Nous recevons énormément de mails dans une journée, il faut apprendre à faire le tri ».

La « Bible », l’agenda de la rédaction

À 24 ans et après avoir travaillée ici ou là dans d’autres journaux locaux enchaînant les contrats précaires, Audrey a décroché un CDI. Consciente du contexte économique peu favorable dans lequel est plongé la presse aujourd’hui, elle se dit rassurée de pouvoir bénéficier d’une situation stable. Sa motivation, son professionnalisme et son envie de réussir l’ont sans soute emmené dans la bonne direction.

« Quand je suis sortie de l’école avec mon Bac +3 en poche, mes premiers pas sur le marché du travail ont été complexes. J’ai enchaîné les petits contrats, souvent d’une courte durée, à gauche à droite. Tous les six mois, j’étais contrainte de déménager pour m’installer dans une autre ville que je ne connaissais pas. Mais ma persévérance a payé et j’ai finalement obtenu un CDI ».

Une fois la boite mail checké, Audrey jette un coup d’œil à la « Bible », l’agenda de la rédaction. La journaliste a toujours en tête ses rendez-vous de la journée mais préfère vérifier « au cas où ». Si elle n’est pas en reportage, Audrey rédige ses « papiers » et si elle n’est pas en train d’écrire, alors elle est en rendez-vous. La journaliste, dynamique, a la fâcheuse tendance d’arriver presque toujours en retard sur les lieux de rendez-vous. Ce qui a pour principale conséquence qu’elle ne respecte pas assidûment les limitations de vitesse. Parce-que oui, la rédaction est située en plein centre mais Audrey est en charge d’une zone géographique très précise, vaste aussi, en périphérie de la ville dans la campagne normande. La voiture est donc sa meilleure amie. C’est d’ailleurs une des nombreuses difficultés auxquelles elle doit faire face. Pour se rendre sur les lieux de ses reportages, il lui faut parfois jusqu’à 45 minutes voire une heure de route.

« Le temps que je passe en voiture est phénoménal, c’est une contrainte avec laquelle je dois composer mais c’est parfois pénible. »

« Devoir travailler dans la rapidité »

12H30. C’est l’heure de la pause déjeuner. Audrey rentre chez elle tous les midis puisqu’elle a le confort d’habiter à quelques rues seulement de la rédaction. Une heure plus tard, la deuxième partie de la journée peut commencer.

En phase de digestion, les cerveaux tournent au ralenti. Mais pas le temps de s’assoupir, le journal ne va pas se faire tout seul. Pour Audrey, les journées ne sont bien souvent pas assez longues. En plus de s’occuper d’une très large zone géographique, la journaliste gère aussi un autre territoire pour un second titre de presse. Elle a également en charge les faits divers et doit, comme Laura, Florian et Isabelle, les deux autres journalistes, alimenter et animer les réseaux sociaux. Facebook, Twitter… et désormais Instagram.

« Plus les mois, les années défilent, plus la masse de travail s’accroît. Les tâches s’accumulent au fil du temps et il va y avoir un moment où on ne pourra plus tout faire. Partir en reportage, rédiger nos articles, relire, corriger, vérifier, mettre en page, répondre au téléphone, aux mails, gérer les réseaux de correspondants, alimenter les réseaux sociaux, répondre aux commentaires, aux messages… Cette polyvalence s’avère autant stimulante que stressante. Être journaliste dans la société actuelle, même en PHR contrairement à ce que l’on pourrait croire, c’est avant tout devoir travailler dans la rapidité, tout en étant clair, concis et compréhensible par le plus grand nombre ».

Rencontrer la population, varier les sujets, travailler à chaud… Pour rien au monde, Audrey n’échangerait son métier. Même si elle doit faire face, aujourd’hui, à quelques difficultés, c’est la passion pour sa profession qui l’a fait avancer.

« Rendre service aux gens, c’est la raison pour laquelle je me lève chaque matin ».

Léa Le Breton