Ce vendredi 27 avril 2018, le lycée Simone Weil du Puy-en Velay a organisé une table ronde dont le thème portait sur « Sciences, Manipulations et Croyances ». Trois personnalités ont apporté leurs arguments sur la question : Jusqu’où la science peut-elle manipuler le vivant ?
Les élèves ont eu pour rôle, tout au long de l’année, d’organiser ce débat citoyen. Ces derniers devaient inviter des personnalités, afin de débattre sur la question.
Le lycée a eu la chance de pouvoir accueillir trois personnes qui ont répondu présent aux invitations rédigées par les élèves : un avocat, un ancien sénateur, ainsi qu’un scientifique.
M. VEY, qui a remporté le Concours de plaidoirie d’Assas et créé en 2010 la Nuit de l’Eloquence, était ce jour-ci présent pour aborder les aspects légaux et juridiques.
M. ROCHE, ancien sénateur de Haute-Loire et ancien praticien au centre-hospitalier d’Emile Roux, apportait son expertise politique et médicale.
M. SARRAUSTE, ingénieur au CNRS et responsable de l’Ecole de l’ADN, représentait le monde de la recherche scientifique.
Le débat citoyen, animé par différents élèves de seconde et de terminales L ou STL, s’est déroulé en trois axes.
Le premier s’intitulait « Que peut techniquement la science sur le vivant ? ».
Le deuxième « Qu’est-il autorisé de faire sur le vivant ? ».
Et enfin, le troisième se nommait « Qu’est-il souhaitable de faire ? Quel projet de société ? ».
Ceux-ci ont été alimentés par des élèves qui avaient préparé des questions. Entre ces différents axes ont été présentés des travaux en lien avec ce débat : plaidoiries, présentations d’articles postés sur ce site, ainsi qu’une pièce de théâtre. La salle de conférence accueillait par ailleurs une exposition d’affiches et d’exposés réalisés par des élèves de terminale. L’assistance, nombreuse, était constituée d’élèves du lycée, d’enseignants (certains à la retraite), de parents d’élèves et d’auditeurs libres.
De nombreux sujets, liés au progrès scientifiques, ont été abordés :
- Crispr Cas 9, outil génétique qui sectionne le gène pour modifier une portion d’ADN. Les élèves du lycée avait déjà assisté au mois de décembre à une intervention de M. SIATKA sur le sujet (voir le webdoc réalisé à cette occasion : « L’ADN : un pas vers le futur »).
- Les lois de bioéthiques avec la problématique « Qu’est il autorisé de faire sur le vivant ? ». La bioéthique étudie les questions et les problèmes moraux qui peuvent apparaître à l’occasion de pratiques médicales nouvelles impliquant des manipulations au niveau du vivant ou de recherche en biologie. Il faut donc réglementer cet aspect de l’éthique. La bioéthique s’intéresse à de nombreux sujets tels que la procréation médicalement assistée (fécondation in vitro, la gestation pour autrui), l’euthanasie (provoquer la mort d’un individu atteint d’une maladie incurable, coma, sous contrôle médical) , le prélèvement d’organes en vue de transplantation, le génie génétique (CRISPR Cas9) et le clonage de tissus humains. Tous ces sujets ont été évoqué tout au long du débat, notamment le clonage qui présente des contraintes. En effet si on se clonait, au fil des générations les avis seraient différents, et du point de vue économique on rencontrerait des limites.
- L’ADN (Acide Désoxyribo-Nucléique) permet depuis environ 60 ans d’identifier la totalité des individus présents sur la Terre. L’ADN est donc aujourd’hui utilisé comme preuve digitale (crime, passeport, papier d’identité, prise de sang …etc.). Aujourd’hui, on peut retirer un gène, le séquençage du génome humain s’est donc beaucoup amélioré depuis les années 2000. Cela coûtait initialement énormément d’argent. Or actuellement, les coûts ont chuté et cela se pratique (presque) partout sur la planète. Tout cela pourrait permettre à chacun de choisir sa constitution, sa forme physique, mais aussi être utilisé dans les maladies génétiques et dans la prévention de celles-ci.
- L’éternité, qui semble bientôt accessible scientifiquement, a été source de débat : pour l’un des orateurs, ce n’est pas une notion humaine. Pour un autre, l’homme serait tenté par l’éternité, mais surtout par la jeunesse éternelle, car la technologie et la science évoluant, si on devenait trop vieux, on ne pourrait plus suivre les nouveautés, on ne pourrait plus apprendre. De plus, dans un demi-siècle, on ne pourra pas nourrir tout le monde, il faudra donc bien qu’il y ait des personnes qui décèdent. Devenir éternel est possible scientifiquement, mais pas économiquement. Mais il y a une très grande différence entre utiliser cette technologie et subir les conséquences de cette utilisation.
- Concernant la manipulation, M. VEY a évoqué l’anecdote suivante: « 14 millions de personnes ont été manipulés par une bloggeuse qui conseillait à ses abonnés de manger des graines pour être beau et en bonne santé. Malheureusement, ses conseils ont provoqué de graves carences et séquelles chez les followers. La bloggeuse elle-même souffrait de maladies liées à la consommation de graines. Elle a donc arrêté d’en manger, mais a continué de publier des vidéos et des articles comme si tout allait bien. La bloggeuse a été poursuivie en justice pour mise en danger de la vie d’autrui. »
Voici ci-dessous l’article du code pénal en rapport :
Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.
Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui.
Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.
Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer.
Il n’y a point de contravention en cas de force majeure. »
Les trois invités, sénateur, avocat et scientifique ont donc chacun leur tour apporté leur contribution au débat. La question finale pourrait être la suivante : La science va-t-elle uniquement apporter des choses positives, ou va-t-elle être nuire au développement de l’Homme? Tous les trois pensent que la science ne nuit pas à l’Homme, mais que son utilisation déraisonnable peut conduire à sa perte, car elle peut devenir une arme. Ils se sont mis d’accord sur le fait qu’une mauvaise utilisation de la science peut tuer le vivant.
Ce débat s’est conclu par un buffet, offert par l’établissement, pour les auditeurs, les élèves, les professeurs, et bien sûr pour les invités. Chacun a pu communiquer avec les personnalités afin de poser d’autres questions, dans certains cas plus approfondies pour aller plus loin dans l’analyse ou pour apprendre plus sur la science.
Enfin, les élèves du lycée ont été satisfaits d’avoir participé à ce débat qui a apporté de nombreuses réponses à leurs questions. Certains ont regretté que les personnalités soient vraiment complémentaires dans leurs réponses et pas assez en opposition comme on peut l’observer lors de débats politiques ou autres.
Les élèves de seconde ont rédigé une lettre de sincères remerciements pour leurs invités dynamiques et charismatiques.